Conseils
Paysan qui cherche femme,
Prends-là, plus tôt que plus tard,
Au coeur simple, au doux regard :
Si ses yeux on trop de flammes...
Crois-moi, paysan, crois-moi !
Ne la prends pas, jarnigoi !
Ces yeux-là ne sont pas nôtres,
C'est le paradis des autres,
Ce sera l'enfer pour toi !
Prends-la de grandeur moyenne,
Et d'esprit à l'unisson.
Si sa taille et sa raison
Dépassent trop la tienne...
Crois-moi, paysan, crois-moi !
Ne la prends pas, jarnigoi !
Forte taille et forte tête,
Pour les tiens c'est la tempête,
Et c'est la grêle pour toi.
Prends-là d'aplomb sur ses hanches,
De corps sain, d'aspect nerveux,
Belle même si tu veux ;
Mais si ses mains sont trop blanches...
Crois-moi, paysan, crois-moi !
Ne la prends pas, jarnigoi !
Ces mains ne savent rien faire :
C'est du travail pour ta mère
Et c'est du souci pour toi.
Paul DEROULEDE