Le chat et les deux souris
LE CHAT
Oh ! la gentille créature !
Viens, donc petite, approche-toi,
Je veux voir de près ta fourrure,
Tu n’as rien à craindre de moi.
LA SOURIS
N’y va pas, mon enfant, prends garde !
LE CHAT
Viens donc, je ne suis pas méchant !
LA PETITE SOURIS
De quel œil doux il me regarde
LE CHAT
Vois cette noix cueillie au champ ;
Elle est fraîche, elle est toute tendre.
Tiens, prends-la.
LA PETITE SOURIS
Je ne puis l’entendre
Sans me sentir au fond du cœur
Tout émue.
LA SOURIS
Enfant, sois prudente ;
Son langage est faux et trompeur.
LE CHAT
Vois cette dragée.
LA SOURIS
Il te tente
Enfant, ne l’écoute pas.
LA PETITE SOURIS
Mais
Il a l’air si bon, si sincère !
Il ne me mordra point.
LE CHAT
Jamais !
LA PETITE SOURIS
Tu vois, j’y puis donc aller, mère ?
LA SOURIS
Non, reste.
LE CHAT
Oh ! viens, te dis-je, viens !
Vois ces trésors que je possède
Et j’ai chez moi de plus grands biens ;
Tu les auras. Viens !
LA PETITE SOURIS
Si je cède
Qu’ai-je à redouter ?
LA SOURIS
Tout.
LE CHAT
Rien.
LA PETITE SOURIS
Ah !
Je meurs ! il m’étouffe ! le traître !
Mère, au secours !
LA SOURIS
Le scélérat !
LE CHAT
Elle aurait dû mieux me connaître.
Jean REMY