Les boeufs et le loup
L'été, lorsque du ciel tombe enfin la nuit fraîche,
Les bestiaux, tout le jour retenue dans la crèche,
Vont errer librement : au pied des verts coteaux,
Ils suivent pas à pas les longs détours des eaux,
S'étendent dans les près, ou dans la vapeur brune
Hennissent bruyamment aux rayons de la lune.
Alors, de sa tanière, attiré par leurs voix,
Les yeux en feu, le loup, comme un trait sort du bois,
Tue un jeune poulain, étrangle une génisse.
Mais, avant que sur eux l'animal bondisse,
Souvent tout le troupeau se rassemble, et les boeufs,
Les cornes en avant, se placent devant eux.
Le loup rôde à l'entour, ouvrant sa gueule ardente,
Et, hurlant, il se jette à leur gorge pendante ;
Mais il voit de partout les fronts noirs se baisser,
Et des cornes toujours prêtes à percer.
Enfin, lâchant sa proie, il fuit, lorsqu'une balle
L'atteint, et les bergers, en marche triomphale,
De hameaux en hameaux promènent son corps mort.
BRIZEUX