Le Pélerin
"Bon châtelain, écoutez ma prière :
Je viens à pieds du tombeau du Seigneur
Et je m'assieds tristement sur votre grandeur.
Puisse le Ciel bénir vos nobles armes,
Que vos exploits marquent votre chemin,
Que votre coeur soit touché de mes larmes,
Ayez pitié du pauvre Pélerin !"
Mais, insensible à celui qui l'appelle,
Le châtelain n'entendit point sa voix.
Trois fois le cor sonna sur la tourelle
Et l'écho seul lui répondit trois fois.
Le lendemain, la cloche du domaine
Avait tinté l'Angelus du matin,
Quand le seigneur en venant dans la plaine,
Heurta du pied le corps du Pélerin.
Depuis ce jour, au fond de ses domaines,
Le châtelain vivait dans le remords,
Et quand le vent faisait craquer les chênes
Pour lui ces cris étaient des cris de mort.
Parfois, la nuit, une fête splendide
Lui permettait de s'asseoir au festin :
Toujours alors son oeil terne et livide
Voyait passer l'ombre du Pélerin.
Ballade.