Le soir
Fatigué de battre la campagne, le soleil descend
Et rentre à l'écurie sa jument blanche ;
L'oiseau, pour dormir, replie son aile.
Revenant des champs, le laboureur passe
Et rentre à la maison, courbé, la tête basse,
Les membres fourbus et la jambe lasse.
Les brebis, doucement, sur chaque chemin,
Rentrent, soulevant un flot de poussière ;
La baguette à la main, la bergère les suit.
Dans chaque maison, de la cheminée
Dans le ciel serein monte la fumée
Qui flotte par dessus les collines, la vallée.
Il fait sombre et l'angélus sonne,
Et sur les champs, de tous côtés résonne.
Sur le chemin noir, il ne passe plus personne.
Dans l'ombre, la nuit déployant ses voiles
Sur sa barque arrive chargée d'immortelles ;
Le ciel, petit à petit, se remplit d'étoiles.
Le grillon caché dans la haie chante,
Et du ver luisant la lueur brillante
Remplit les enfants de peur, d'épouvante.
Et la chauve-souris, dans l'ombre, s'envole.
On entend, dans la nuit, crier le hibou,
Et au cimetière, un feu follet s'envole.
Et dans la nuit brune,
Derrière le Malein,
Monte lentement
La lune.
Eloi ABERT (1848-1914)