Quoy ? Qu'est-ce que cecy ? Ma Mignonne...

Quoy ? qu'est-ce que cecy, ma Mignonne, es-tu folle ?
Ne te mocques-tu point ? penses-tu appaiser
L'audace de mon feu par un simple baiser,
D'un gracieux regard, d'une douce parolle ?

Ni pour la compagnie, il faut que je t'accolle,
Ne crains qu'on le descouvre, on ne peut d'adviser,
Selon qu'il me plaist ore avec toy deviser
Assis sur ceste chaire aggreablement molle.

Puis chacun parle à part s'entretenant tout bas,
Faisons ainsi afin qu'on ne s'en doute pas,
Prenons l'occasion qui douce nous saluë.

Là feignat d'admirer ton bel entendement,
Te serrant pres de moy j'hausseray vistement
Ton linge delié par ta juppe fenduë.

Marc de Papillon de Lasphrise (1555-1599)
Soudard et poète, tel est le double visage de Marc de Papillon, Capitaine de Lasphrise, né près d'Amboise en 1555. Engagé dans l'armée dès son plus jeune âge, il commence par traquer les pirates barbaresques en Méditerranée. Ensuite, il se vend au plus offrant et participe à toutes les grandes batailles de son temps.
Vers sa vingtième année, alors qu'il mène au Mans la vie fastidieuse d'un soldat au repos, il s'éprend d'une novice du couvent du Pré, Renée Le Poulchre. Le son de sa voix angélique fait se pâmer l'aventurier. Il lui fait une cour assidue et l'accable de poèmes. Elle prononce néanmoins des voeux définitifs au désespoir de son amant... qui se console avec une autre, nommée dans ses écrits Noémie la Tourangelle. Elle se montre moins farouche que Renée dont elle est la cousine, mais finit par épouser un barbon.
Papillon revient à la poésie où il laisse s'exhaler la violence toute charnelle de son désir. Mais sa vie trépidante et les excès l'ont prématurément vieilli. Paralysé par la goutte, il se retire dans son fief. Il s'occupe de l'éducation de sa fille, la petite Marguerite, née dans des circonstances obscures. Il meurt à quarante-quatre ans.