Le Fuseau de Grand'Mère
Ah ! le bon temps qui s'écoulait
Dans le moulin de mon grand-père !
Pour la veillée on s'assemblait
Près du fauteuil de ma grand'mère.
Ce que grand-père racontait,
Comme en silence on l'écoutait !
Et comme alors gaîment trottait
Le vieux fuseau de ma grand'mère !
Comme il trottait !
Et quel bon temps ! quel temps c'était !
Grand-père était un vieux bonhomme,
Il avait bien près de cent ans.
Tout était vieux sous son vieux chaume,
Hors les enfants de ses enfants :
Vieux vin dans les vieilles armoires,
Vieille amitié, douce toujours ;
Vieilles chansons, vieilles histoires,
Vieux souvenirs des anciens jours !
Grand-mère était la gaîté même ;
On la trouvait toujours riant :
Depuis le jour de son baptême
Elle riait en s'éveillant ;
De sa maison, riant asile,
Elle était l'âme : aussi, depuis
Que son fuseau reste immobile,
On ne rit plus dans le pays.
Le vieux moulin de mon grand-père
Tout comme lui s'est abattu ;
Le vieux fuseau de ma grand'mère
A la muraille est suspendu.
Et vous, couchés sous l'herbe épaisse,
Comme au vieux temps encore unis,
Je crois vous voir quand le jour baisse,
Et tout en larmes je redis :
Ah ! le bon temps qui s'écoulait
Dans le moulin de mon grand-père !
Pour la veillée on s'assemblait
Près du fauteuil de ma grand'mère.
Ce que grand-père racontait,
Comme en silence on l'écoutait !
Et comme alors gaîment trottait
Le vieux fuseau de ma grand'mère !
Comme il trottait !
Et quel bon temps ! quel temps c'était !
Edouard PLOUVIER