A une quêteuse
Au sortit d'un sermon, à genoux à la porte,
Vous quêtiez - c'est pénible et fatigant : n'importe !
Vous trouvez qu'on n'est pas à plaindre, en vérité,
Quand du pauvre et du ciel on a bien mérité.
Vous étiez souriante, heureuse de bien faire :
Votre main attentive et toute à son affaire
Secouait gentiment le sac avec l'argent
Pour vaincre les rétifs par ce bruit engageant.
Je passais : et vers moi vous tendîtes la bourse
Où plus d'un malheureux vient chercher sa ressource.
Lorsque j'y déposai mon offrande, mes yeux
Y plongèrent bien vite un regard curieux.
Ah !... je ne le dis pas sans regret ni sans honte
(D'ailleurs, vous le savez, en ayant fait le compte) ;
Mais, malgré vos efforts, malgré vos mille soins,
Qui font qu'une autre aurait encore eu beaucoup moins,
Au milieu des gros sous tombés en avalanches
A peine scintillaient une ou deux pièces blanches ;
Et je vis qu'étouffé sous ce billon sali
L'éclat du bon métal avait déjà pâli.
Alors, je m'en allai, le coeur plein d'amertume,
Et je tirai de là, comme c'est ma coutume,
Une conclusion - attristante à coup sûr, -
Que de cuivre ici-bas ! combien peu d'argent pur !
Paul COLLIN