Une bonne servante
O ma vieille servante aux épaules penchées
Toi qui savais si bien quand j'étais tout petit,
Calmer en souriant mes douleurs épanchées ;
Toi qui vis partir ceux que la mort engloutit.
Toi qui partageas tout, ma douleur et ma joie,
Toi que rien n'a lassée et dont le dévouement
Depuis trente deux ans a marché dans ma voie,
Sans hésiter jamais, sans faiblir un moment.
Toi qui respectas tout, injustice et caprice,
Du jour où tu m'a pris dans ton bras jeune et fort,
La lèvre humide encor du lait de ma nourrice,
Le lendemain du jour où mon père était mort.
Toi qui, vieille à cette heure et par les ans courbée,
Restes auprès de moi, comme un témoin vivant
De toute chose, hélas ! sous le temps succombée
De tout ce qu'ont brisé les jours en se suivant.
Ton vieux coeur dévoué, sans tendresse importune
Ignorant l'intérêt et les calculs méchants,
A suivi ma mauvaise et ma bonne fortune
Pas à pas, m'entourant toujours de soins touchants.
Chacun de mes chagrins, ou faux ou légitimes,
A fait couler des pleurs de tes yeux attristés ;
Tu sus prendre part dans mes drames intimes,
Tu fus inébranlable en mes adversités.
Maxime du CAMP